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Bruss’Help co-construit son masterplan intitulé : « vers une région sans privation de chez-soi »

Bruss’Help convie les acteurs.ices du secteur de l’aide aux sans-abri ainsi que les représentants des secteurs connexes [santé, mobilité, administrations, logement…] pour rédiger un MASTERPLAN pour que la Région de Bruxelles-Capitale sorte du sans-abrisme.

Le Masterplan a pour objectif de produire – à travers l’élaboration d’actions concrètes – une stratégie globale de lutte contre l’absence de chez soi en collaboration avec tous les acteurs directement ou indirectement concernés par l’absence de chez soi en Région de Bruxelles-Capitale. Les objectifs poursuivis par ces diverses actions devront être atteints pour 2029.

4 thèmes seront travaillés au cours de 3 journées de travail :

  1. Thème 1 : La prévention de l’absence de chez-soi
  2. Thème 2 : Les mécanismes de prévention précoce dès qu’une personne n’a plus de chez soi
  3. Thème 3 : L’accompagnement/la stabilisation lorsque la personne en a besoin
  4. Thème 4 : Les mécanismes de violence et d’injustice institutionnelle

Lors de la séance inaugurale, Christine Vanhessen [Directrice de l’AMA] a dressé un diagnostic de l’aide aux personnes sans abri :

Plus de 150 ex-occupants de la rue des Palais ont passé la nuit le long du canal (BX1 – 16.02.2023)

La Croix-Rouge ouvre ce mardi un nouveau centre d’accueil pour personnes sans-abri à Bruxelles (Le Soir – 13.02.2023)

Incendie sur le parvis de l’hôtel communal : Molenbeek se porte partie civile, Catherine Moureaux soupçonne “une technique violente anti sans-abri” (DH – 10.02.2023)

« C’est intenable, on envisage de fermer certains services », l’aide aux sans-abri est en difficulté (RTBF – 25.01.2023)

Les pompiers de Bruxelles interviennent pour un incendie dans un camp de réfugiés et SDF (RTBF – 20.01.2023)

 

Voici quelques titres de journaux parus ces derniers jours…  J’aurais pu remonter à quelques mois et nous aurions lu des titres du genre « L’hiver est à nos portes, des places d’hébergement d’urgence vont ouvrir » ou encore « Un sans-abri a été arrêté par la police car il avait un comportement agressif ».

Je ne sais pas ce qu’il en est pour vous, mais il me semble que les personnes sans abri méritent mieux que les marronniers des médias ou la rubrique des faits divers.

Et que dire de la place donnée dans les médias aux services du secteur de l’aide aux sans-abri ?  Avec un peu de chance, un article paraîtra pour annoncer l’ouverture d’un centre ou lorsqu’une carte blanche sera publiée pour dénoncer une situation critique comme l’impact de la crise énergétique sur les services du secteur de l’aide aux sans-abri.

Avons-nous, à ce point, peur de montrer la misère à nos portes et de dénoncer une société toujours plus excluante ?

Les dénombrements réalisés à Bruxelles depuis 15 ans, et un peu partout en Belgique depuis 2020, indiquent un nombre toujours croissant de personnes sans abri et mal logées.

Les associations du secteur de l’aide aux personnes sans abri dénoncent, depuis des années qu’elles saturent sous les demandes.  Qu’elles doivent refuser tous les jours des personnes, des hommes, des femmes, des familles.  Elles réclament, à coups de mémorandum et d’actions de visibilité, des moyens supplémentaires pour faire face aux demandes et proposer un accueil de qualité à des personnes vulnérables, victimes de violences, sans papier, avec des troubles de santé mentale, dépendantes à diverses substances, désaffiliées sociales… et dont le point commun est l’absence de logement.

Depuis plus de 130 ans, des services d’hébergement de courte ou longue durée, des services ambulatoires proposant un accueil en journée ou un accompagnement en rue, de services d’accompagnement vers et dans le logement accompagnent des personnes dont les parcours de vie les ont amenés à se retrouver au bord du précipice, si pas dans la spirale de la descente aux enfers.

Depuis une vingtaine d’années, si des projets d’insertion vers le logement ont vu le jour à l’initiative du secteur de l’aide aux sans-abri [citons ici, par exemple, le suivi post hébergement initié par les maisons d’accueil mais aussi les services de guidance à domicile ou de Housing first], dans le même laps de temps, un opérateur, puis 2, puis 3 ont été créés pour ouvrir de nombreuses places d’hébergement d’urgence à destination d’un public le plus désaffilié de tous : les sans papier, les sans revenu, les trop ou pas assez, ceux dont aucun autre service ne peut assurer un accueil si ce n’est de le laisser dormir en rue ou dans des squats.

Ainsi, le secteur de l’aide aux sans-abri voit coexister, depuis plusieurs décennies, 2 grandes tendances : l’urgence et l’insertion.

Qui dit 2 tendances, dit aussi complémentarité de l’offre mais aussi concurrence parfois entre les opérateurs.

En effet, lorsque les uns sont tenus de respecter des règlementations strictes avec des normes architecturales et d’encadrement, ne leur permettant ni de pousser les murs, ni d’héberger gratuitement car cela ne leur est pas autorisé par leur pouvoir de tutelle, les autres répondent en urgence à des situations urgentes en ouvrant de-ci 200 places dans des bureaux désaffectés, de-là 150 places dans un hall de sport.  Débloquant, de la sorte, de nombreux subsides dits facultatifs ou d’exception et rassurant les Gouvernements en faisant place nette dans l’espace public.

Alors quand les uns désespèrent de voir leurs missions renforcées par l’arrivée de nouveaux travailleurs.euses [dont des psychologues, des infirmiers mais aussi du personnel administratif et d’entretien] les autres, pour pouvoir héberger en urgence, engagent à tour de bras, voir sont parfois tentés de sous-traiter l’accueil à des sociétés de gardiennage.

Il n’est question, ici, ni de valoriser un dispositif ou d’en dénigrer un autre.  Il s’agit juste d’un constat qui traverse le secteur bruxellois de l’aide aux sans-abri depuis plus de 20 ans !

Je salue, toutefois, l’énergie et les ressources que les uns et les autres ont déployés toutes ces années pour faire face à des demandes et des contraintes toujours plus nombreuses, dans un contexte socio-économique et politique tantôt discret, tantôt plus engagé mais souvent dépassé par l’ampleur de la situation.

Tout ceci est ou, devrais-je dire, a été vécu en Région de Bruxelles-Capitale ces 20 dernières années.  Mais tout cela a bien changé depuis 4 ans !

En effet, au début de cette législature 2019/2024, le Gouvernement bruxellois s’est juré de ne plus financer de nouveaux dispositifs d’urgence mais de renforcer les services d’insertion « vers le logement » pour sortir durablement de la spirale infernale de la gestion de l’urgence.  Convaincu, disait-il, que sans négliger le rôle des opérateurs de l’urgence, si l’on n’investit pas assez dans des solutions d’accès et de maintien en logement, il faudra encore longtemps mettre la main au portefeuille pour trouver des solutions en urgence.

Force est de constater que des moyens colossaux ont été déployés pour le secteur de l’aide aux sans-abri ces 15 dernières années, passant, par exemple, pour les services subventionnés par la COCOM de 5.072.000€ en 2007 à 54.811.000€ en 2023 !

A ce montant 2023, il y a lieu d’ajouter, de manière non-exhaustive, les budgets de prolongation de dispositifs hôteliers ouverts pendant la crise sanitaire ainsi que des budgets pour la coordination de l’accueil des réfugiés ukrainiens, l’ouverture de places d’hébergement d’urgence pour héberger les demandeurs d’asile et les squatteurs de la rue des Palais.

Comme je l’ai évoqué, ces montants concernent principalement des mesures liées à des dispositifs d’urgence.

A contrario, les services d’insertion « vers et par le logement », s’ils ont bien été renforcés ces dernières années, n’ont pas bénéficié d’une augmentation proportionnelle.  Pire, la part consacrée aux budgets des maisons d’accueil, des services de guidance à domicile et des services de Housing first a diminué de 34% (en 2019) à 30% (en 2023) en 4 ans.

Les services d’hébergement d’urgence voyant, quant à eux, leur part augmenter de 57% à 59% du budget annuel de la COCOM.

Une fois de plus, je ne suis pas là pour dire qu’il ne fallait pas renforcer ces services de l’urgence dont on a bien besoin mais, c’est un constat, les politiques ont du mal à sortir la tête des différentes crises traversées pour chercher et renforcer les sorties durables du mal et sans-logement.

En tant que fédération rassemblant plus de 100 de services à Bruxelles et en Wallonie, l’AMA considère la personne sans abri comme « une personne qui ne peut temporairement accéder à un logement à usage privatif adéquat, ou le conserver, à l’aide de ses propres ressources ».  Cette personne peut être un homme, une femme ou un enfant accompagnant son ou ses parents.  Ils et elles rencontrent des difficultés sociales dont la perte ou l’absence de logement est le dénominateur commun.

La crise du logement et la flambée des loyers ne font que compliquer les choses pour un public déjà fragilisé.  Ce problème se trouve aggravé par d’autres phénomènes concomitants comme la précarisation de l’emploi, la croissance de la facture énergétique, la crise migratoire, l’augmentation du nombre de familles monoparentales suite à des ruptures de couples, ainsi qu’une extrême complexité administrative dans laquelle de nombreuses personnes s’enlisent, perdant parfois des droits fondamentaux par simple manque d’information.

Les crises successives que nous connaissons, telles que :

  • la crise du logement abordable depuis plus de 20 ans
  • la banqueroute économique de 2008
  • les différentes crises de l’asile et de l’accueil de 2015 ou l’actuelle
  • la crise du Samusocial de 2017
  • la crise sanitaire du Covid en 2020 et 2021
  • la crise énergétique en 2022

Les crises, donc, impactent des publics toujours plus nombreux qui, jusqu’alors, tenaient +/- le coup.  Les services d’aide aux sans-abri voient arriver de plus en plus de personnes qui n’avaient encore jamais eu recours à ce type d’aide.

Si les services d’aide aux personnes sans abri répondent à des besoins criants, force est de constater qu’à peine ouverts, ils sont déjà saturés alors que les demandes d’accompagnement ou d’hébergement se font entendre chaque jour.  Obligeant, parfois, certains services à sélectionner les personnes demandeuses d’une aide, celles qui seront les « plus vulnérables », laissant, de facto, sur le carreau celles qui sont jugées plus aptes à se débrouiller seules.

Plus d’une soixantaine de services d’aide aux personnes sans abri et mal logées sont agréés ou subventionnés en Région de Bruxelles-Capitale.

Les réglementations du secteur ont été promulguées en 1999 pour la plus ancienne [COCOF].  Ces réglementations se sont adaptées, ces dernières années, aux besoins des publics ou des politiques volontaristes de lutte contre le sans-abrisme.  Ainsi, les maisons d’accueil agréées par la COCOF, outre leurs missions de base que sont l’accueil, l’hébergement, l’accompagnement et le suivi post-hébergement, sont renforcées afin de remplir des missions supplémentaires comme le soutien aux victimes de violences conjugales et intrafamiliales, le soutien à la parentalité ou encore le soutien au logement.

Dernière grande modification réglementaire en date, en 2019, la COCOM, se dote d’une ordonnance relative à l’urgence sociale et à l’insertion, valorisant des services existants et reconnaissant des services comme les accueils de jour, le Housing first et créant un organisme de coordination Bruss’Help.

Par ailleurs, à côté des services agréés, de nombreuses initiatives coexistent sur le territoire bruxellois.  Initiatives qui ne demandent qu’à être agréées et subventionnées.  Je pense ici à des services d’accueil de jour qui, faute de budget suffisant à la COCOM ne sont pas financés.

Dans le même sens, des services humanitaires gèrent des places d’hébergement d’urgence, certains depuis de nombreuses années, sans être agréés mais en bénéficiant de subsides conséquent leur permettant de remplir une mission essentielle de mise à l’abri de personnes qui ne peuvent bénéficier d’aucune aide, ni du Fédéral, ni des Communes à part, l’aide médicale urgente… et encore !

Ces subventions et ces nouvelles réglementations ont permis, indéniablement, d’améliorer la qualité de l’accueil, d’engager des travailleurs.euses supplémentaires, de se spécialiser dans l’accompagnement de certains publics comme les victimes de violences ou les personnes qui cumulent un long parcours de rue avec des problématiques de santé mentale et de toxicomanie.  Des services se sont, aussi, développés dans l’accompagnement au logement et d’autres font le lien entre le secteur de l’aide aux sans-abri et le secteur du logement.

Mais, comme je l’ai dit, nous sommes face à un paradoxe !

Alors que pendant des années, le secteur de l’aide aux sans-abri peinait à répondre aux besoins des personnes qui frappaient à leurs portes et ce, faute de budget suffisant.  Aujourd’hui, les budgets ont été libérés, des centres ont été créés et renforcés mais le nombre de personnes sans abri et mal logées ne diminue pas avec comme conséquence que le secteur peine toujours à répondre aux besoins et doit toujours refuser des personnes.

Tout comme le sparadrap qui protège une plaie, on peut avoir le plus beau sparadrap du monde, si l’on ne soigne pas la plaie elle ne guérira pas.

Dès lors, si la création de nouvelles structures d’aide et surtout le renforcement de l’existant paraît comme une évidence, il faut impérativement qu’en amont :

  • des mesures soient prises afin que le nombre de personnes en précarité diminue
  • il faut que le nombre de logements à loyer modéré augmente
  • il faut soutenir les travailleurs.euses des services d’aide aux sans-abri pour qu’ils.elles puissent travailler en partenariat avec leurs collègues des autres secteurs sociaux, de l’éducation, de l’Aide à la Jeunesse, de la santé
  • il est impératif qu’une fois la période d’hébergement terminée, un accompagnement en logement puisse être renforcé

Il est, par ailleurs, impératif que tous les niveaux de pouvoirs de la maison Belgique, sans oublier l’Europe, s’articulent entre eux pour assurer une meilleure complémentarité dans les solutions à mettre en œuvre pour qu’en 2030, comme se le sont fixés les États membres de l’Union européenne, plus personne ne dorme dans la rue.

Enfin, je souhaite saluer l’engagement et le professionnalisme de nombreux.euses travailleurs.euses et bénévoles qui œuvrent au quotidien dans le secteur.  Que ce soit dans des centres de coordination comme Bruss’Help et les fédérations, dans des associations dont certaines ont été créées à la fin du 19ème Siècle, sans oublier les agent.es des services publics tels que les CPAS, la STIB, la Police, les administrations régionales et communales, etc., sans ces personnes, sans ces passionné.es, sans ces créateurs.trices de projets, sans ces nombreux.euses précurseurs qui ont tenté de nouvelles approches, qui ont donné de la place à l’expertise des personnes sans abri elles-mêmes, notre secteur ne serait rien !

Les différents Gouvernements et Ministres qui se sont succédés au portefeuille de l’Action sociale et de l’Aide aux personnes ont pris certaines orientations heureuses ou moins heureuses dans le passé.  Aujourd’hui, il est temps de se retrousser les manches non pas pour ouvrir toujours plus de places, mais pour garantir que l’accès aux droits fondamentaux, tel que le droit à une vie digne, ne soit plus un objectif mais une réalité !

L’ASBL AMA

Créée en mai 1968, la Fédération des maisons d’accueil et des services d’aide aux sans-abri (AMA) fédère des institutions assurant l’accueil, l’hébergement et l’accompagnement d’adultes et de familles en difficultés psychosociales mais aussi des personnes morales ou physiques actives dans le domaine de l’aide et de l’accueil de personnes en grande précarité sociale.

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