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A Bruxelles, la violence de la rue n’épargne plus la porte d’Ulysse

Le centre d’accueil pour les migrants en transit accueille un public de plus en plus multiples, parfois difficile à gérer. La Plateforme demande des moyens à hauteur des besoins.

Portes closes, pas de dispatching. Les migrants qui bénéficient habituellement d’un hébergement de la Plateforme citoyenne ont retrouvé le sol froid du parc Maximilien ces lundi et mardi soir. Le collectif a marqué un bref coup d’arrêt après des échauffourées devant la porte de son centre d’accueil à Haren ce week-end. Alors qu’un groupe s’était vu refuser l’accès – le centre étant complet – une quinzaine de personnes ont pris pour cible le bâtiment à « coup de jets de pierres ». Des événements qui s’inscrivent dans un climat de tension croissant, marqué par une agression au couteau, et que la Plateforme impute à une sous-évaluation des besoins en matière d’hébergement d’urgence des sans-abri : de plus en plus de personnes sollicitent les services de la Plateforme, en ce compris un public pour lequel le dispositif n’a pas été pensé.

La porte d’Ulysse souffre en fait de l’ambiguïté de sa situation. Le lieu a été créé et pensé pour accueillir une population spécifique, facile à gérer – des migrants en transit pour l’Angleterre qui ne sont que depuis peu dans la rue –, mais récupère les laissés pour compte de la fin du plan hiver. « Lorsque vous avez une personne devant vous qui a besoin d’un hébergement, vous ne cherchez pas à savoir si elle correspond au profil, insiste Mehdi Kassou. Le problème c’est qu’on a 300 places… pour beaucoup trop de monde. »

Ces derniers jours, près d’un tiers des personnes accueillies à la porte d’Ulysse n’étaient pas des migrants en transit, assure le porte-parole de la Plateforme citoyenne. « En cas de refus, la plupart des gens acceptent la situation et se tournent vers d’autres solutions mais il y a une poignée d’irréductibles, toujours les mêmes, qui posent problème. Des gens dont on comprend rapidement qu’ils ont été ravagés par la vie en rue : assuétudes, troubles mentaux… » La Plateforme appelle à l’ouverture urgente de nouvelles places d’accueil pour répondre aux besoins. « Si on avait la capacité d’absorber et de gérer le suivi de leur dossier et de leur intégration, on le ferait avec plaisir, mais on ne peut pas se retrouver seul à gérer cette problématique. Et ce sera pire à l’automne. »

« Des tensions inévitables »

« Il y a des situations plus compliquées à gérer avec un public chronicisé dans l’errance, des personnes présentant des troubles psychiatriques, des addictions à l’alcool, à la drogue, reconnaît Christophe Tielens le porte-parole du Samusocial qui gère actuellement 468 places d’accueil. Nous avons des équipes plus adaptées avec des médecins, des infirmiers, des procédures claires. Mais même avec une approche aussi professionnelle que possible, on est régulièrement confronté à des cas de violence extrême. » La zone de police de Bruxelles Capitale reçoit ainsi en moyenne un appel tous les quatre jours pour des incidents aux abords d’un des centres de 110 places du Samusocial (du tapage à la bagarre). C’est un peu plus fréquent pour la porte d’Ulysse (qui accueille trois fois plus de monde). « C’est sûr qu’il y a davantage de tensions lorsque les places manquent. Mais on peut avoir la capacité d’hébergement qu’on veut, il y aura toujours des tensions. Le monde de la rue est parfois très violent. C’est le fait d’une minorité mais qui mobilise beaucoup d’énergie. »

Une réunion est prévue ce mercredi avec la Région et la Ville, cette dernière ayant déjà annoncé qu’elle renforcerait la sécurité à la porte d’Ulysse ainsi qu’au parc Maximilien. La Région, qui a déjà déboursé plus de 2 millions d’euros au mois de mai pour l’accueil, risque d’avoir du mal à faire davantage, surtout dans un contexte où elle estime que le volet migration relève du fédéral.

540 places d’hébergement

Bruxelles dispose actuellement d’environ 540 places d’hébergement d’urgence pour sans-abri dont la plupart (468) sont gérées par le Samu social. Il faut ajouter au dispositif la porte d’Ulysse, gérée par la Plateforme citoyenne grâce à un financement de la Région et le soutien de la Ville. Ce centre qui s’adresse initialement aux migrants en transit peut accueillir 300 personnes (et pousse souvent un peu au-delà). La Région a beaucoup investi pour répondre aux situations d’urgence : le Samu social ne disposait que de 110 places il y a seulement quatre ans. En mai 2018 ce sont ainsi 600.000 euros qui ont été débloqués pour la porte d’Ulysse et 1,7 million pour le Samu social.

Au cours des mois les plus froids, le dispositif est doublé du plan hivernal (pris en charge par la Région et le Fédéral) et monte à environ 1.300 places.

«Le problème c’est l’accès au logement»

Ouvrir de nouvelles places d’hébergement d’urgences ne peut être une réponse à long terme estime Yahyâ Hachem Samii, directeur de La Strada, le Centre d’appui au secteur bruxellois d’aide aux sans-abri.

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Faut-il augmenter le nombre de place d’hébergement en dehors du plan hivernal ?

Le nombre de place d’hébergement d’urgence n’a cessé d’augmenter ces dernières années. La Région a financé le quadruplement de la capacité du Samu social en quelques années. Sans compter les 1.200 à 1.500 personnes qui se sont vus proposer un hébergement par une ASBL qui les accompagne pour les aider à s’installer et affronter toutes les difficultés qu’elles soient administratives, médicales… Il y a énormément de choses qui sont faites à Bruxelles. Mais c’est vrai : on double les capacités d’accueil au moment hiver et les centres sont immédiatement pleins. Les besoins sont très importants et la situation se complexifie car Bruxelles est sur la route migratoire et que le gouvernement Fédéral refuse de prendre part. Il faut aussi prendre en compte qu’il n’y a pas de politique uniforme pour la prise en charge du sans-abrisme. On a par exemple eu un Anversois qui nous expliquait qu’on l’avait envoyé à Bruxelles parce qu’il trouverait des facilités pour se soigner. Non seulement Bruxelles est la Région la plus pauvre mais en plus elle doit gérer les SDF des autres localités.

Le nombre de personnes sans-abri ne cesse d’augmenter. Il faut bien trouver une solution, non ?

Le problème de Bruxelles, c’est l’accès au logement et aux droits sociaux. L’évolution des prix des loyers par rapport au niveau de vie a créé un décrochage des tranches les moins favorisées. Il y a des initiatives innovantes de logements modulaires sur des terrains qui ne sont temporairement pas exploités, par exemple, mais on reste sur des mesures transitoires et pas structurelles. Ce qu’il faut ce sont des logements à bas prix. Alors augmenter le nombre de places d’accueil d’urgence, pourquoi pas, mais c’est de l’argent que vous n’investissez pas dans des mesures à long terme. Et en attendant on entretient le sans-abrisme plus qu’on ne le résout. La Finlande et la Norvège ont eu de très bons résultats en investissant dans le logement. Et trouver des solutions durables permet de libérer des places d’hébergement d’urgence. Sinon on augmentera indéfiniment le nombre de places, surtout avec un Etat fédéral qui refuse de reprendre en charge les migrants en transit.

Mais que peut-on faire à court terme ?

Mehdi Kassou et Pierre Verbeeren ont récemment proposé d’ouvrir un centre d’accueil et d’orientation, pourquoi pas. Je ne dis pas que c’est LA solution, mais c’en est une. Demander aux autorités régionales d’intervenir alors qu’elles ont déjà sorti les moyens… A un moment, la COCOM n’a pas les poches extensibles. On comptait en mars plus de 4.000 personnes sans abri (personne en structure d’accueil comprises, NDLR). A court terme, Bruxelles me semble au maximum de ses capacités.

A lire aussi : https://www.rtbf.be/info/regions/detail_plus-de-1400-lits-pour-personnes-sans-abri-en-region-bruxelloise?id=10005050

L’ASBL AMA

Créée en mai 1968, la Fédération des maisons d’accueil et des services d’aide aux sans-abri (AMA) fédère des institutions assurant l’accueil, l’hébergement et l’accompagnement d’adultes et de familles en difficultés psychosociales mais aussi des personnes morales ou physiques actives dans le domaine de l’aide et de l’accueil de personnes en grande précarité sociale.

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