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« Les invisibles » : Rendre leur dignité aux femmes sans-abri

Plongée, entre rires et larmes, dans un centre de jour qui accueille des SDF dans le nord de la France.

Qu’est-ce qui a bien pu se passer ? Après des mois de travail pour lui obtenir un appartement, Audrey (Audrey Lamy), qui travaille à l’Envol, un centre d’accueil de jour pour femmes SDF du nord de la France, voit redébarquer devant elle Catherine Lara (Brigitte Sy) – ces femmes sans toit sont en effet toujours accueillies de manière anonyme, via un pseudonyme qu’elles se choisissent. A son assistante sociale, la quinquagénaire explique que son logement était trop loin du centre-ville, qu’il lui fallait faire 50 km et deux bus pour rejoindre ses copines de l’Envol et qu’elle a donc préféré retourner à la rue…

Face à ses maigres résultats en termes de réinsertion, les autorités municipales décident de fermer le centre. Sa directrice (Corinne Masiero) prend alors la responsabilité de continuer malgré tout à tenter de réinsérer Salma Hayek, Brigitte Bardot, La Cicciolina, Amel Bent et Brigitte Macron. Quitte à tomber dans l’illégalité, en accueillant ces femmes pour la nuit.

Pour son troisième long métrage, Louis-Julien Petit aborde à nouveau une question sociétale brûlante en France. Après la question du gaspillage alimentaire dans Discount en 2015 et celle du burn-out dans le téléfilm Carole Matthieu en 2016, le cinéaste de 35 ans s’attaque ici à la réinsertion des SDF dans la France d’Emmanuel Macron. Pour ce faire, il s’est inspiré du livre de la journaliste Claire Lajeunie Sur la route des invisibles, publié en 2015 dans la foulée de son documentaire en immersion pour France 5 auprès de femmes sans-abri.

Le sujet est douloureux et aurait pu vite verser dans la chronique dépressive. le cinéaste choisit au contraire de s’inspirer du modèle de la comédie sociale anglaise façon Full Monty, pour trouver le parfait équilibre entre la description édifiante d’une réalité sociale inhumaine et une forme d’optimisme revendiqué. Fût-il en grande partie utopique.

Mais cet humour vivifiant ne se veut jamais moqueur vis-à-vis de ses personnages. Cette force de rire de situations tragiques, cette soif de vivre, Louis-Julien Petit les trouve auprès de ces femmes elles-mêmes qui, face aux excellentes comédiennes professionnelles (Audrey Lamy, Corinne Masiero, Noémie Lvovsky, Deborah Lukumuena…), campent des personnages qui leur ressemblent, qui sont passés par les mêmes affres du désespoir.

En donnant un visage à ces femmes démunies et peu visibles – alors qu’elles représentent 40 % des SDF français -, Les invisibles entend tout simplement leur rendre leur dignité, leur permettre de se présenter telles qu’elles sont, avec fierté, devant la société. A ce titre, le personnage le plus impressionnant est celui de Chantale, une femme d’une cinquantaine d’années qui refuse de passer sous silence que sa formation de mécanicienne s’est faite dans un centre de formation très spécial, celui de la prison de Loos, où elle purgeait sa peine pour avoir assassiné son mari… En intégrant cette histoire vraie à son récit, et combien d’autres, Louis-Julien Petit confère à son film une dimension bouleversante. Et nous oblige à ouvrir les yeux sur une misère sociale qu’on préfère souvent ne pas voir.

Hubert Heyrendt, La Libre Belgique, disponible sur La libre.be : https://www.lalibre.be/culture/cinema/les-invisibles-rendre-leur-dignite-aux-femmes-sans-abri-5c3484637b50a6072478884b

L’ASBL AMA

Créée en mai 1968, la Fédération des maisons d’accueil et des services d’aide aux sans-abri (AMA) fédère des institutions assurant l’accueil, l’hébergement et l’accompagnement d’adultes et de familles en difficultés psychosociales mais aussi des personnes morales ou physiques actives dans le domaine de l’aide et de l’accueil de personnes en grande précarité sociale.

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