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Sans-abrisme à Bruxelles : l’urgence prime toujours sur les mesures structurelles

À Bruxelles, le nombre de sans-abris augmente d’année en année. Et aujourd’hui, l’accueil d’urgence ne suffit plus.

Cette nuit-là, il est minuit quand les professionnels et les bénévoles, les hôpitaux et les transports publics terminent leur comptage. Un an plus tard, les chiffres de ce soir de novembre viennent éclairer une situation toujours plus préoccupante : celle des sans-abris de la capitale. Après avoir croisé les tableaux, ils étaient 4 187 à Bruxelles le 5 novembre 2018. Un dénombrement qui sert à mettre en perspective les chiffres récoltés tous les deux ans : « le nombre de personnes sans-abri et mal logées en Région de Bruxelles-Capitale a plus que doublé au cours des dix dernières années (+142,2%) », dévoile ainsi l’étude du Centre d’appui au secteur bruxellois d’aide aux sans-abri — récemment rebaptisé Bruss’Help.

Au-delà de la rue

L’objectif de l’analyse est, notamment, « d’appréhender la distribution des différentes formes d’absence de logement ou de mal-logement ». C’est que quand on parle de sans-abrisme, c’est généralement aux personnes passant leurs nuits dans la rue auxquelles on pense. La réalité que recouvre Bruss’Help est néanmoins beaucoup plus large. Nombreux (22%) sont ceux qui vivent également dans des maisons d’accueil et des logements de transit ou dans des habitations inadéquates comme des squats ou des communautés religieuses (24,8%). « Certaines catégories de la population concernée restent cependant invisibles à nos outils : c’est le cas notamment des personnes menacées d’expulsion ou de celles qui, ayant perdu leur logement, séjournent chez des amis ou dans leur famille », expliquent les auteurs de l’étude. On appelle ce phénomène le « sans-abrisme caché », une tendance dont il est compliqué de connaitre l’ampleur aujourd’hui. Par ailleurs, les chiffres montrent également que significativement plus de femmes (+68%) vivent désormais dans la rue par rapport à il y a deux ans.

sans-abrisme

Répartition des personnes sans abri, sans logement ou en logement inadéquat. Source : La Strada

Des pouvoirs publics acculés

Au-delà des chiffres, il y a bien sûr des gens. Mais également des politiques, qui « semblent avoir privilégié la simple mise à l’abri (…) au détriment d’une approche plus structurelle basée entre autres sur le renforcement des dispositifs d’accompagnement et de suivi », pointe l’analyse. « L’explosion du nombre de prises en charge dans les centres d’hébergements d’urgence (+ 594,9 % depuis 2008), notamment lorsqu’on la compare à la très faible augmentation du nombre de places disponibles en maison d’accueil (+ 15,9 %), témoigne tout particulièrement des orientations prises ».

S’il faut bien évidemment répondre à l’urgence d’une nuit, l’impact structurel est trop limité. Pire, certains plans sont parfois contre-productifs sur le long terme. Le document du Centre d’appui au secteur bruxellois d’aide aux sans-abri dénnonce en effet une certaine « gestion au thermomètre » : si la capacité d’hébergement d’urgence augmente en période de grand froid, le reste de l’année, les moyens sont largement insuffisants. Pour la Fondation Abbé Pierre et la Fédération européenne des organisations nationales travaillant avec les sans-abris, « le manque de places disponibles, d’alternatives de sorties vers le haut, transforme les dispositifs d’urgence en parc d’attente saturé » .

La réalité, pour les auteurs de l’étude, c’est que « les pouvoirs publics bruxellois peinent à faire face à l’évolution croissante du sans-abrisme. De l’avis de nombreux observateurs, les mesures palliatives adoptées pour endiguer le phénomène ne sont pas à la hauteur du défi à relever : l’augmentation du nombre de personnes sans-abri et mal logées, constatée dans la quasi-totalité des grandes villes européennes, ne pourra être enrayée qu’à la condition de s’attaquer aux mécanismes conduisant à l’exclusion ». Les causes principales du sans-abrisme sont pourtant bien identifiées : à Bruxelles, les pauvres sont de plus en plus pauvres, le contexte actuel défavorable à l’accès au logement et les politiques de flux migratoires inadaptées à répondre à la question.

Les citoyens prennent le relais

Le comptage effectué en novembre 2018 met également en lumière un autre phénomène : ce soir-là, une personne sur quatre a trouvé une solution d’hébergement hors du circuit subventionné. Les Bruxellois impliqués dans la Plateforme citoyenne ont par exemple hébergé bénévolement 248 personnes ce soir-là. L’association gère aussi le centre d’hébergement de la Porte d’Ulysse. Pour l’étude, si cette aide est précieuse, elle est aussi problématique : « au-delà de son intention première, ce type d’initiative risque d’invisibiliser le manquement des pouvoirs publics – qui parallèlement se désinvestissent déjà progressivement de leurs missions en se reposant sur la multiplication des initiatives privées ».

Des initiatives sur le long terme ont tout de même été soutenues par les pouvoirs publics, avec résultats : des programmes tels que le « Housing First » — l’accès immédiat à un logement, sans condition, si ce n’est de payer chaque mois son loyer — ont permis à quelque 1 514 de sortir de la rue ou de l’éviter. Sauf que là aussi, l’aide est à double tranchant : « ces services ne peuvent toutefois fonctionner qu’à la condition de pouvoir capter des appartements décents à loyer modéré. Le parc de logements de ce type est limité et les différentes structures – qui finissent par être en concurrence pour leur obtention – participent, à leur corps défendant, à retirer du circuit des logements bon-marché qui auraient pu profiter à des ménages précaires ». La situation est donc bien plus complexe qu’il n’y parait, à tel point qu’une réforme du secteur de l’aide aux sans-abri a été votée en mai 2018. Mais les mesures efficaces, elles, continuent de se faire attendre, tandis que dans la rue, chaque jour compte.

Source: Moustique.be – publié le 7/11/2019

https://moustique.be/24891/sans-abrisme-bruxelles-urgence-prime-toujours-sur-les-mesures-structurelles

L’ASBL AMA

Créée en mai 1968, la Fédération des maisons d’accueil et des services d’aide aux sans-abri (AMA) fédère des institutions assurant l’accueil, l’hébergement et l’accompagnement d’adultes et de familles en difficultés psychosociales mais aussi des personnes morales ou physiques actives dans le domaine de l’aide et de l’accueil de personnes en grande précarité sociale.

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